Myrna Hornby - No time for moaning

Tout le  monde à Poudlard connait Mimi Geignarde, mais plus rares sont ceux qui se sont arrêtés suffisamment longtemps dans ses toilettes pour connaître son histoire. Si vous l’aviez fait (et franchement, vous auriez dû, respect aux morts !), le nom d’Olive Hornby vous serait familier. Ennemie jurée de Myrtle Warren (Mimi, vous suivez ?), cette adolescente a surtout eu le malheur de découvrir son corps, puis de se faire hanter par son fantôme. Mimi l’a poursuivie partout, jusqu’au mariage de son frère, ce qui a finalement conduit à son bannissement à l’enceinte de Poudlard seulement, sur décision du Ministère.

Rapport avec le schmilblick ? Le fameux frère d’Olive, Franck, s’est bel et bien marié à Roselyn  Ingham. Ils eurent quatre enfants, treize petits-enfants et parmi eux… Myrna. Elle est le troisième enfant de Gilfred Hornby, Cracmol et mécanicien de son état, et de sa première épouse, Verity Astruc, employée au ministère de la magie. Verity était une sorcière d’origines modestes, mais plutôt douée et ambitieuse. De simple réceptionniste au Département de la Justice Magique, elle se hissa grâce à des cours du soir jusqu’au statut de greffière principale pour le Magenmagot.  Malheureusement, le temps de plus en plus important que consacrait Verity à son travail, et des relents de jalousie de moins en moins étouffés de la part de Gilfred face aux pouvoirs de sa femme finirent par avoir raison de leur union lorsque Myrna avait 4 ans. Deux ans plus tard, Gilfred se remaria avec Alice Russet, charmante conductrice de bus, rencontrée au hasard d’un accident moteur à un carrefour de leur petite bourgade du Lancashire. De cette seconde union naquirent deux autres enfants, moldus.

Gilfred obtint la garde de ses aînés pour des raisons pratiques, les horaires de travail de Verity étant plutôt aléatoires, et Myrna a donc grandit dans une famille recomposée, working class assumée et hétéroclite. Alice avait bien compris que ses beaux-enfants étaient un peu… spéciaux, mais elle n’a jamais vraiment su pourquoi. Myrna, qui, à l’instar de ses deux aînés, avait manifesté les premiers signes de magie relativement tôt (face à une envie pressante en plein apprentissage de la propreté, son pot en plastique s’était envolé tout seul vers elle), garda ses capacités privées, s’en servant surtout pour impressionner son petit frère et sa petite sœur. La sorcellerie était pour elle un jeu d’enfant, une source de joie euphorisante mais pas très concrète, à manipuler avec un peu de méfiance, aussi. Quand Papa disait de Maman que c’était une « sorcière », ça n’était pas du tout un compliment, et elle n’avait pas vraiment envie de devenir ça à son tour.

A onze ans, Myrna rejoignit Poudlard et pour la première fois de sa vie, rentra vraiment de plein fouet dans le monde de la magie. Ce fut un sacré choc. Tout était grand, différent, des objets qui auraient dû être inanimés bougeaient, et on attendait soudain d’elle que non seulement elle ait des pouvoirs, mais encore qu’elle les maîtrise. Avec une baguette. Devant des gens. Être une sorcière n’était plus une insulte, c’était son identité, et elle était loin d’être la seule. C’était aussi exaltant que terrifiant.  Myrna se révéla une élève médiocre dans les matières qui ne l’intéressaient pas trop (à quoi servait l’histoire de la magie, hum ?), et sans facilités particulières, mais avec un enthousiasme appréciable dans celles plus à son goût, généralement appliquée. Elle n’avait pas été élevée dans une famille hautement intellectuelle jusque-là, la bibliothèque et son silence de cimetière l’impressionnait plus qu’autre chose (ce n’était pas difficile d’imaginer Mrs Pince avec cagoule et faux, prête à terrasser le moindre contrevenant chuchoteur) et devoir écrire des kilomètres de parchemin était ennuyeux, en plus de faire mal au poignet. Ce que Myrna aimait le plus, c’était voir comment utiliser la magie pour améliorer le quotidien. Les licornes et le Quidditch, c’était super, mais est-ce que les sorciers se rendaient compte qu’on avait là les moyens d’inventer la lessive détachante ultime à base de bave de Musards ? Que les elfes de maison en savaient dix mille fois plus que les humains sur la manière de rendre l’argenterie brillante, et que les Portoloins pouvaient remplacer pour pas très cher et écologiquement une voiture diesel ? Ils vivaient dans un monde incroyable !!! La fin de l'oppression des travailleurs était presque atteignable,  si on tendait suffisamment sa baguette !

Pour ça, elle savoura chaque minute de sa scolarité. De nature sociable, elle se fit également de nombreux amis et son enthousiasme naturel lui assura d’être toujours bien entourée (ce qui était quand même pratique quand il s’agissait de trouver quelqu’un sur qui copier une dissertation d’astronomie). Myrna ne se laissant jamais ralentir par ses difficultés ou ses échecs, elle trouva des voies de traverse à tous les problèmes qu’elle aurait pu rencontrer. Elle passa le Noël de sa 4ème année à Poudlard, parce que l’essence magique qu’elle avait voulu fabriquer avec quelques ingrédients volés dans la réserve de potion, et qu’elle souhait offrir à son père et à sa belle-mère, ne se laissa pas fabriquer comme elle voulait et lui brûla tous les cheveux (et les sourcils, Merlin !), qui refusèrent de repousser (bleu électrique initialement) avant trois semaines. Impossible d’apparaître sur les photos de famille comme ça. Un heureux accident qui l’empêcha de briser le Code International du Secret Magique, mais n’étant pas très introspective, elle ne s’en rendit compte qu'environ dix ans plus tard seulement. Sa collection d’ASPIC fut hétéroclite (et un peu maigre), mais vous pouvez blâmer ce petit minable d’Elvis Flint, qui eut la malhonnêteté de la larguer 10 minutes avant son oral de Soin aux Créatures Magiques, la laissant pleurer (de rage, s’il vous plaît) lamentablement sur un hippogriffe peu enthousiaste à l’idée que l’on mouille son plumage.

A la fin de ses études, sans grande idée de carrière devant elle, elle se trouva un peu désoeuvrée. Sa mère Verity lui trouva un stage d’été au Ministère de la Magie, et elle en détesta chaque seconde avec passion. Comment pouvait-on travailler à longueur de journée dans un endroit sans même la lumière du jour, replié sur son petit nombril de sorcier, à ne penser absolument qu’à soit et à la communauté magique, avec un dédain incroyable pour les créatures magiques et les moldus ? La plupart des hauts fonctionnaires à qui elle devait dire bonjour chaque matin avec un sourire faux et une grimace dissimulée semblaient prendre les gens comme son père pour des simples d’esprit. Des gens gentils, à protéger de toutes velléités génocidaires de mages noirs, pour sûr, mais quand même un peu neuneus.

Sans aucun doute un peu trop entière dans ses opinions, elle effectua un virage à 180 degrés et retourna donc ensuite chez son père. Là aussi, cependant, l’ennui l’attendait. Devoir cacher ses pouvoirs magiques ne faisait plus d’elle une super héroïne espionne top secrète comme quand elle avait dix ans, c’était juste frustrant, ennuyeux, et elle ne se sentait plus à sa place. Plus à sa place nulle part.

Finalement, ce fut sa grande sœur qui comprit le mieux son besoin de changer d’air, tout simplement, et l’aida à trouver un poste de jeune fille au pair chez une famille nord-américaine. Hester Eastley, présidente du Salem Institute for Witches et épouse d’un diplomate britannique, avait besoin d’aide pour élever ses trois enfants. Myrna, elle-même issue d’une famille nombreuse, se révéla excessivement compétente à ce poste. On lui laissait toute latitude dans la maison et tout en s’occupant des enfants, elle s’employa à trouver toutes sortes d’astuces pour se faciliter le ménage et l’entretien du domicile, les Eastley n’ayant pas d’elfe de maison. Myrna inventa notamment un sort permettant de simultanément déneiger, saler et chauffer par le sol une allée, particulièrement utile lors des rudes hivers de Nouvelle-Angleterre, mais que faute de connaissances en matière de marketing, elle garda strictement pour elle… jusqu’à ce qu’un voisin ne la voie faire et ne le lui pique. Sachez donc que c’est à elle, et elle seule que l’on doit le « Déneigetout Mather », qui aurait vraiment dû s’appeler « Fondflocon Hornby ».

De jeune fille au pair, Myrna fut promue gouvernante, et resta 5 ans chez les Eastley. Elle les quitta lorsque leurs aînés, des jumeaux, rentrèrent à Ilvermorny. De là, elle repartit en Angleterre, pour devenir gouvernante du cousin de M. Eastley, M. Brakebills. Lui n’avait pas d’enfants, mais un immense domaine à entretenir et un standing social à tenir. Les Brakebills se voulaient des  sorciers « éclairés » par leurs lointains liens avec la Révolution américaine, et avaient décidé de  ne pas  avoir d’elfes de maison, tout en adorant employer du personnel de maison. Mrs Brakebills, qui s’intéressait à la culture moldue « pour s’instruire », était une très grande fan de Downton Abbey et n’adorait rien tant que de jouer les comtesses avec son petit personnel. Myrna devait y être beaucoup moins heureuse et considérée que dans son précédent emploi. Elle s’aigrit  même passablement, et trouva consolation dans de petits actes de rébellion insignifiants : dessiner au Déneigetout quelques dessins obscènes dans la neige, vite effacés avec un sourire servile, « voler »  des tomates cerises dans le garde-manger pour sa consommation personnelle, « oublier » de déloger le Doxy accidentellement installé dans le gant de toilette de Madame… De petites revanches insignifiantes et puériles égayant d’assez longues journées, où elle eut quand même le temps de s’améliorer encore en matière de ménage et d’entretien magique. Myrna était particulièrement fière de réussir à entretenir des artefacts agressifs ou anciens (les Brakebills aimaient bien frimer avec leurs collection « ancienne » légitimant leurs attitudes de nouveaux riches).

A chaque remarque désagréable, Myrna augmenta un peu ses mini-vengeances, subtilisant, au hasard, papier toilette, polish pour baguettes, argenterie, chapon de Thanksgiving, une poignée de poudre de cheminette, quelques ingrédients coûteux  pour potion, trois boutons de manchette… et dégaina des méthodes de gestion et de ménage de plus en plus brillantes, osant même  enfin faire ses recherches dans la bibliothèque de la maison (tutorer les petits Eastley l’avait plus décomplexée dans ce domaine que sept années d’études à Poudlard). Etait-ce de la mesquinerie puérile ? De l’énervement face à la désinvolture avec laquelle on la traitait, là où chez les Eastley, elle avait été un membre à part entière de la maisonnée ? Un dédain véritable pour une conception sociétale de ses employeurs ? Le train train aurait pu continuer comme ça longtemps, si en bonne loser chronique, Mymy ne s’était pas retrouvée prise dans la vague d’un autre membre du personnel.

Helen Baxter était la femme de chambre personnelle de Mrs Brakebills et il s’avéra, le jour où on réalisa qu’elle tentait depuis des mois d’empoisonner sa maîtresse, que c’était aussi la maîtresse de Mr Brakebills. Un scandale magnifique et violent où tout le savoir vivre et la communication prônés jusque-là par cette belle famille. On hurla, on cassa des assiettes et des miroirs (et ça brisa le cœur de Myrna qui les avait époussetés avec amour pendant 2 ans) et on enquêta. Dans l’ampleur du désastre, ses petits méfaits (« vraiment, c’était rien qu’une tabatière et deux torchons ») furent évidemment découverts et étalés avec le reste du linge sale des Brakebills dans les tabloïds.

Sans emploi, sans réputation, Myrna passa une année dans la tourmente. Elle fit même deux semaines de détention provisoire à Azkaban, une expérience dont elle ne vous parlera sans doute jamais. Certes, la prison sorcière n’est plus gardée par des Détraqueurs depuis la chute de Voldemort mais tous les prisonniers vous diront que leur essence (on ne peut pas vraiment parler d’âme) suinte encore des pierres. Helen avait tenté de faire accuser Myrna à sa place, et elle failli  bien réussir, mais la jeune femme n’était pas ultra crédible dans le rôle de la veuve noire et finit heureusement par être innocentée, conservant au passage sa baguette. Elle vous dira que son avocat commis d'office n'avait qu'à prouver qu'être un peu ingénieuse et pauvre n'était pas un crime (c'est sa version un peu branlante des faits). Le Magenmagot la condamna  à des travaux d’intérêt général, et à rembourser le montant (finalement beaucoup plus élevé que ce qu’elle aurait cru) des objets volé à ses employeurs, ainsi qu’une belle amende. Autre conséquence de ce rebondissement, sa mère mortifiée de devoir organiser  le procès de sa propre fille, cessa de lui adresser la parole.

Ce fut finalement Hester Eastley qui vint à son secours, alors que Mymy squattait tête basse le canapé de sa grande sœur. Pleine de grandes idées sur la sororité sorcière, et n’ayant eu l’occasion de voir que les bons côtés de la jeune femme lorsque celle-ci était son employée, elle fit fonctionner le considérable réseau qu’elle et son mari possédaient, et recommanda la jeune Hornby comme concierge à  Poudlard lorsqu’Argus Rusard prit enfin sa retraite.

Depuis désormais un an, Myrna est donc la nouvelle concierge de Poudlard ! Elle reste sur la paille, parce qu'un tiers de son salaire est saisit directement tous les mois pour rembourser ses dettes de justice, mais elle adore son nouvel emploi. Redécouvrir  le château en tant qu’adulte est absolument fascinant. Il y a plein d’aspects techniques à son nouveau job d’entretien, vus toutes les particularités du château, et c’est la première fois qu’elle travaille avec des elfes  de  maison, qui s’avèrent des collègues très agréables. Myrna ne conçoit pas du tout son métier comme subalterne, et elle en est très fière. Elle sait qu’elle est indispensable pour fournir un cadre de vie agréable, propre  et confortable aux élèves et au reste du staff, elle maîtrise des techniques poussées pour entretenir certains artefacts magiques ou anciens, dont certaines qu’elle a inventé elle-même. Portraits parlants, armures animées, escaliers mouvants, rien ne lui résiste. Elle aime aussi bien la conception moldue du concierge, celui qui sait tout. Les  adolescents  et leurs manies la font souvent rire sous cape, et elle adore les potins, pour autant qu’ils soient légers. Elle veut tout savoir et répète pourtant peu, respectueuse de la pudeur des jeunes. Ce sont un peu « ses enfants », ou plutôt, une ribambelle de petits frères et sœurs, envers qui elle n’hésitera pas à se montrer taquine, surtout s’ils lui manquent de respect. Elle aurait à coeur de  leur transmettre des sortilèges ménagers efficaces, car elle est fière de sa véritable expertise technique et pense que que cela pourrait être utile dans leur vie de tous les jours et de futurs adultes... mais peu de monde semble intéressé.

L'arrivée des "nouveaux sorciers" au printemps 2020 l'a intriguée, et elle a discuté assez longuement de son étonnement avec ses amies américaines, mais l'attrait de la nouveauté est désormais passé et elle est plus préoccupée par le travail supplémentaire que ces ados lui donnent que par le mystère de l'origine de leurs pouvoirs.